lundi 6 juillet 2009

Festivités du 30 juin 2009 à Goma : Combien ça coûte ?


La ville de Goma abrite ce mardi 30 juin les festivités commémoratives du 49ème anniversaire de l’accession de la RD Congo à l’indépendance. Selon de bonnes sources, «sur ordre de la haute hiérarchie», plusieurs dizaines de millions de dollar auraient été décaissés à la Banque centrale du Congo.

« Cadeau » du chef de l’Etat

En provenance de Kisangani, Joseph Kabila est arrivé dimanche 28 juin à Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu. But de la visite : présider les festivités marquant le 49ème anniversaire de la proclamation de l’indépendance. Le «raïs» a décidé de placer cette «fête» sous le double signe de «libération de la ville de Goma des affres de la guerre» et de «réconciliation» entre la RD Congo, le Burundi et le Rwanda. Selon une certaine presse belge, le président rwandais Paul Kagame pourrait y participer. Sans doute en tant que «guest star». Les gouverneurs des provinces frontalières des trois pays ont eu une «réunion de concertation» mi-juin à Bukavu, chef-lieu de la province du Sud Kivu. L’ordre du jour n’a pas été divulgué. C’est dire que rien n’est laissé au hasard. Ayant d’autres soucis existentiels, la grande majorité de Kivutiens du Nord autant que ceux du Sud risque d’être ni de coeur ni d’esprit avec les "fêtards" au moment où les combattants des FDLR sont devenus de plus en plus cruels. Un million de Kivutiens sont en errance.

Mardi 30 juin, Kabila devrait - avant de présider le défilé des «forces vives» - inaugurer la «Foire agricole de Goma pour la paix» (Fagop), initiée par le ministre de l’Agriculture Norbert Basengezi Kantitima. «Cette foire est un cadeau du chef du l’Etat à la population du Nord-Kivu pour sa collaboration active avec le gouvernement», a-t-il dit, jeudi 10 juin. Cette manifestation, prévue du 30 juin au 14 juillet, a, dit-on, l’ambition d’être un rendez-vous pour les opérateurs économiques du monde agricole mais aussi culturel et touristique. «Cette foire est ouverte à toutes les provinces du Rwanda, du Burundi et de la RDC, en vue de consolider la coopération et les relations de bon voisinage, ainsi que les échanges commerciaux entre les trois ennemis d’hier, aujourd’hui réconciliés», déclarait, pour sa part, à Bukavu, Emmanuel Libendele, conseiller principal chargé de l’agriculture, de la pêche et de l’élevage à la Présidence de la République. Plusieurs hommes d’affaires venant de ces deux pays voisins sont donc attendus à Goma.

Combien ça coûte ?

A Kinshasa, des «experts financiers» ont les yeux rivés sur la calculette pour avoir une «idée exacte» du coût de la célébration de la fête de l’indépendance au chef-lieu du Nord Kivu. Selon une source bien informée, le président de la République aurait fait extraire du compte du trésor «pas moins de 40 millions USD». Pour quoi faire ? Un analyste proche des «services» d’expliquer qu’un certain «froid» serait perceptible dans les relations entre Kinshasa et Kigali. Quelle en serait la cause ? «Kagame suspecte Kabila et ses généraux de continuer à collaborer avec le staff dirigeant des FDLR», confie cet interlocuteur. C’est tout ? «Par ailleurs, le président rwandais Paul Kagame serait agacé par la lenteur qu’accuse la partie congolaise à rembourser les «frais» occasionnés par la participation des soldats de la Rwandese defence forces (RDF) à l’opération «Umoja wetu» en janvier et février derniers". Le paiement se fera en cash, indique-t-on.

On rappelle que l’armée rwandaise et les Forces armées de la RD Congo s’étaient coalisés pour traquer les miliciens hutus rwandais. De l’avis général, l’opération a été un «flop». D’aucuns suspectent le Rwanda d’avoir voulu, à travers cette action spectaculaire, desserrer l’«étau diplomatique» face aux menaces de suspension en cascade de l’assistance extérieure. Un signe. Le chef d’Etat congolais n’a jamais divulgué le contenu de l’Accord signé avec son homologue rwandais en décembre dernier jetant les bases de cette «réconciliation». Une source est formelle : «Une partie de l’argent décaissé pour la fête du 30 juin est, en réalité, destinée à l’Etat rwandais en remboursement de l’«effort» consenti lors de la «traque». Pour étayer cette thèse, la source refuse de "dire plus" préférant lancer une présomption. Selon elle, l’homme fort de Kigali a la réputation d’un «gestionnaire rigoureux» des finances de son pays. Il ne peut en aucun cas accepter de prendre en charge le déploiement de ses troupes en RD Congo. «Kagame ne badine pas avec les dépenses non prévues dans le budget», confirme un ancien membre du RCD-Goma.

Ordonnateur des dépenses

Dans les salons huppés de la capitale congolaise, l’échange épistolaire Kabila-Muzito et la nouvelle de la prochaine restructuration de la Banque Centrale du Congo (BCC) se trouvent au centre des conversations. Depuis le récent passage de Dominique Strauss-Kahn à Kinshasa, le Fonds monétaire international paraît décidé à exercer une sorte de tutelle sur la BCC. Lundi 12 juin, le gouverneur Jean-Claude Masangu Mulongo confirmait cette nouvelle donne en annonçant la création d’un poste «conseiller général» devant revenir à un expatrié. Question : En faisant décaisser la somme précitée, Joseph Kabila a-t-il voulu «se servir» par anticipation avant l’arrivée des experts du FMI lesquels ne goûteraient guère ce genre de «prodigalité» ?

Si cette sortie de fonds était confirmée alors que les finances publiques sont à sec – et que les salaires des fonctionnaires sont impayés y compris au sein de l’ANR (Agence nationale de renseignements) -, on devrait se poser des questions sur le sérieux de la décision de Joseph Kabila de s’ériger en ordonnateur des dépenses publiques. Dans la lettre adressée au Premier ministre Adolphe Muzito par le directeur de cabinet présidentiel, en date du 28 mai, on peut lire : «En vue de renforcer les dispositions contenues dans mes lettres (…) relatives au plan d’engagement et de trésorerie, écrit Lumanu, j’ai l’honneur de vous informer que sur instruction de la «Haute Hiérarchie», désormais, tout ordonnancement des dépenses publiques devra, avant paiement, requérir l’autorisation préalable de son excellence Monsieur le président de la République. Il en est de même des plans de trésorerie mensuels.» Le directeur d’ajouter : «Cette instruction (…) est dictée par le souci majeur d’endiguer à très court terme, les dérapages substantiels et répétés des finances publiques et de la monnaie nationale, observés au cours des derniers mois, lesquels seraient susceptibles de compromettre les engagements de la République, souscrits auprès des partenaires multilatéraux.»

B.A.W
© Congoindépendant 2003-2009

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