1. Quarante-neuf ans après l’indépendance, quel bilan faites-vous de l’état de la nation congolaise ?
Pour beaucoup d’entre nous, le 30 juin 1960 a marqué la reconnaissance internationale de notre pays et non son indépendance. Cette date n’a symbolisé que le début d’un long combat pour la liberté totale. S’agissant du bilan, il est négatif, car le contexte politique est caractérisé par l’instabilité chronique, la faiblesse des institutions étatiques et de la culture politique, ainsi que l’ingérence extérieure. Sous le régime mobutiste, l’action publique ne s’était guère souciée des préoccupations de la population. Quant à l’espoir suscité par Laurent-Désiré Kabila en 1997, il s’est effondré à cause de l’absence d’ouverture politique et de recherche d’un consensus minimum sur l’État à reconstruire. Avec Joseph Kabila, l’unité nationale est toujours fragile et l’armée désorganisée. Un autre défi à relever, c’est celui de l’équilibre financier entre les provinces et le gouvernement central, auquel il faut ajouter les problèmes de la pauvreté, la santé, l’éducation, l’insécurité…
2. A quoi attribuez-vous les insuffisances des régimes successifs en République démocratique du Congo depuis l’indépendance ?
Le peuple congolais, de l’avènement de Mobutu à la présidence de Joseph Kabila, a toujours été victime du non-respect de la séparation des pouvoirs. Pis encore, les violations de la Constitution ont transformé le chef de l’État en homme-organe. En la foulant aux pieds, le président Joseph Kabila a mis à mal la cohésion nationale et porté atteinte aux combats pour la libération et l’émancipation du peuple congolais. Ainsi, a-t-il contribué à l’anéantissement des efforts fournis depuis le 30 juin 1960. Cet acte grave ne doit pas laisser indifférents les parlementaires, de la majorité comme de l’opposition, ni le peuple congolais qui doit assumer sa responsabilité. La multitude de partis politiques, disons-le également, prouve que le mal congolais tire ses racines dans l’immaturité politique. En tout cas, la tenue d’élections en 2006 n’a pas été suivie de construction des infrastructures de transport, ni de consolidation des fonctions étatiques dans l’ensemble du territoire national, ni de limitation des phénomènes de corruption, ni de cohésion nationale, ni de souveraineté politique.
3. La communauté internationale n’a-t-elle pas aussi sa part de responsabilité dans ce que vous décrivez ?
Bien sûr, la communauté internationale est en partie responsable de la situation actuelle du continent africain. D’ailleurs, dans son discours prononcé, le 11 juillet devant le Parlement ghanéen, le président américain Barack Obama a évoqué la responsabilité commune dans l’exploitation et la déstabilisation de l’Afrique. Mais cela ne doit nullement nous dédouaner de notre incapacité dans la gestion de notre pays depuis le 30 juin 1960. Il est évident que le Congo ne pourra pas relever seul les défis auxquels il est confronté. Le souhait d’Union du Congo, c’est que notre pays améliore la coopération avec ses partenaires étrangers. J’espère que le souhait du président Obama se concrétisera, s’agissant des partenaires africains des États-Unis. Encore faut-il que nous soyons capables de définir un vrai projet de société pour le Congo du troisième millénaire et de le mettre en pratique sans céder à une quelconque menace brandie depuis l’extérieur. En effet, nous devons devenir les premiers gardiens de nos intérêts.
4. Que proposez-vous pour changer le cours des choses au Congo ?
La violence dans notre pays représente une force politique, une variable d’ajustement pour conserver le pouvoir ; l’appartenance ethnique étant privilégiée au détriment du projet politique. Si en 1994, Kinshasa n’a pas été capable de prendre une décision commune sur l’accueil des réfugiés rwandais, cette absence de vision commune se reproduit dans l’état-major des FARDC en proie à l’inexistence du commandement vertical. Primo, nous devons nous focaliser sur l’incapacité dans laquelle se trouve le Congo à prendre en main son destin en palliant l’absence de vision commune des leaders congolais, laquelle affaiblit l’autorité de l’État ; en résolvant en urgence le problème des FDLR pour enlever tout prétexte au président rwandais relatif à une éventuelle menace à partir du territoire congolais ; en réglant très vite les différents petits conflits ethniques pour empêcher nos voisins de continuer de fragiliser notre pays. Secundo, il est nécessaire de faire du Congo un État laïc à part entière, aussi bien en droit que dans les faits, la laïcité devant être un cadre institutionnel. Tertio, nous devons à court terme créer deux brigades pour sécuriser la frontière de l’Est, juste celle avec le Rwanda.
5. Avez-vous une ambition nationale ?
Je n’ai jamais été associé à la gestion de la chose publique congolaise. Mais, j’ai appris en France à gérer une grande agglomération et un État. Un Congolais disposant d’un tel atout, et qui de surcroît aime son pays, ne peut que se mettre au service de ses compatriotes. J’estime que le moment est venu de vaincre les obstacles qui hypothèquent l’avenir de notre pays. J’ai la ferme intention d’associer davantage le peuple Congolais, selon le mérite et à la compétence, à la gestion de la chose publique. S’impose donc une autre dynamique en RDC. Notre pays a plus que jamais besoin d’un leader dont le souffle donnera à nos compatriotes l’irrésistible envie de se mettre en mouvement. Comme je pense en avoir l’étoffe, je me permets de demander au peuple congolais, en tant que Souverain, de m’offrir l’opportunité de mettre en place un projet de société cohérent. Oui, j’ai une ambition nationale. Une ambition collective pour réinventer la manière de faire de la politique et rendre possible une alternative crédible. Je compte faire émerger un projet de société d’avant-garde fort, humaniste et fraternel. Voilà pourquoi, en ma qualité de président d’Union du Congo, j’ai établi la feuille de route pour le Congo du troisième millénaire.
Par Le Potentiel
PROPOS RECUEILLIS PAR ROBERT KONGO, CORRESPONDANT EN FRANCE
(*) Président d’ «Union du Congo».
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