jeudi 18 mars 2010

COMMUNIQUÉ DE PRESSE n° 20100318/005 relatif à la révision constitutionnelle en République Démocratique du Congo

L'assemblée nationale congolaise a ouvert le lundi 15 mars la session en vue de la révision constitutionnelle. Celle-ci portera, entre autres, sur le processus de décentralisation. En effet, la chambre basse a été saisie par les députés de la majorité parlementaire favorables à la suppression de l'énumération des 26 provinces figurant dans l'article 2 de la Constitution, les 40 % de recettes alloués aux provinces conformément à l'alinéa 2 de l'article 147.

L'article 71 est également concerné par la révision constitutionnelle. Effectivement, le scrutin présidentiel pourrait passer à un seul tour ou être maintenu à deux, mais en allongeant l'intervalle entre les deux tours qui serait fixé à deux mois et non plus deux semaines. Autre proposition, les gouverneurs ne seraient plus élus par les députés provinciaux mais désignés par le parti ou la coalition qui est majoritaire au sein de l'Assemblée provinciale.

Selon Radio France Internationale (RFI), plusieurs autres modifications touchant à divers organes juridiques doivent aussi être présentées notamment celle de la composition du Conseil Supérieur de la Magistrature qui serait ouvert à des non magistrats et présidé par le chef de l'État.

I - Sur la révision du découpage territorial et du pourcentage des recettes allouées aux provinces

Dans un communiqué de presse daté du 5 août 2009, Union du Congo avait demandé à l'autorité « compétente de clarifier dans l'urgence la situation actuelle des parlements provinciaux [...] et du sénat au regard de la Constitution, dès lors que le président de la République [avait] constaté la carence dans la matérialisation du passage des 11 provinces à 26 ». Union du Congo avait de facto dénoncé « le caractère anticonstitutionnel de la chambre haute et des parlements de provinces concernées par le découpage prévu à l'article 2 de la Constitution ».

Union du Congo est favorable à la matérialisation du passage des 11 provinces actuelles à 26 provinces déjà dotées d'une vraie existence juridique car leurs noms sont inscrites dans la Constitutions.

Néanmoins, si l'on reste sur la base des 11 provinces, Union du Congo rappelle que le nombre de sénateurs doit être réduit à 44 en raison de 4 sénateurs par province dans la mesure où l'élection des honorables sénateurs et celle de certains députés provinciaux s'est effectuée sur la base des 26 provinces, inexistantes à l'époque mais qui auraient dû être effectives en 2009. Cela aura au moins le mérite de maîtriser l'aspect budgétivore pour ce qui est du fonctionnement du sénat et d'introduire la notion d'équité entre les provinces.

II - Sur la révision du scrutin pour l'élection du président de la République

La majorité présidentielle a-t-elle peur de ne pas gagner l'élection avec le mode de scrutin uninominal majoritaire à deux tours, au point de vouloir modifier la Constitution au profit du mode de scrutin à un tour ? L'éventualité de l'allongement de l'intervalle entre les deux tours à deux mois, et non plus deux semaines, préfigure-t-elle l'intention de l'AMP de bloquer le processus électoral au second tour au cas où les données lui seraient défavorables ?

Union du Congo préconise le maintien du scrutin à deux tours. De plus, ce système permet non seulement aux électeurs de se prononcer en faveur de leur candidat(e) préféré(e) une deuxième fois, ou même de changer d'avis quant à leur préférence entre le premier et le second tour, mais aussi aux partis politiques et à l'électorat de s'ajuster aux éventuels changements de l'environnement politique entre les deux tours de scrutin.

III - Sur la nomination des gouverneurs et la composition du Conseil Supérieur de la Magistrature

Rappelons que, s'agissant de l'organisation et de l'exercice du pouvoir, la volonté de contrer toute tentative de dérive dictatoriale figurait parmi les préoccupations majeures du législateur. Or, en voulant faire présider le Conseil Supérieur de la Magistrature par le chef de l'État, la majorité présidentielle tient à assumer son choix pour les incohérences du passé dignes d'un régime autoritaire.

Rappelons aussi que la présente Constitution réaffirme l'indépendance du pouvoir judiciaire, dont les membres sont gérés par le Conseil Supérieur de la Magistrature désormais composé des seuls magistrats. Faire siéger des non magistrats dans cette institution, c'est renouer avec le système mobustiste qui avait fait main-basse, grâce au clientélisme, sur le pouvoir judiciaire.

Soucieuse du respect de la séparation des pouvoirs, Union du Congo propose, si jamais cette institution est maintenue, que seuls les magistrats siègent au Conseil Supérieur de la Magistrature. Dans ce cas, Union du Congo préconise d'adopter le modèle de la cour suprême des États-Unis d'Amérique.

IV - Sur le caractère anticonstitutionnel de la révision constitutionnelle

Union du Congo constate le caractère anticonstitutionnel de la révision constitutionnelle en cours, car elle viole l'article 220 qui stipule : « la forme républicaine de l'État, le principe du suffrage universel, [...] l'indépendance du pouvoir judiciaire ne peuvent faire l'objet d'aucune révision constitutionnelle ». Le même article insiste sur le fait qu'« est formellement interdite toute révision constitutionnelle ayant pour objet ou pour effet [...] de réduire les prérogatives des provinces et des entités territoriales décentralisées ».

En conséquence, Union du Congo rappelle aux parlementaires et partis politiques leur rôle s'agissant de la promotion de la bonne gouvernance. Par la même occasion, Union du Congo demande aux Congolaises et aux Congolais d'assumer concrètement, d'une manière ou d'une autre, leur souveraineté au cas où les parlementaires bafoueraient les lois fondamentales de la République.

Le Bureau d'Union du Congo

Fait à Paris, le 18 mars 2010

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