lundi 29 mars 2010

Cinq questions à Gaspard-Hubert Lonsi Koko, Président d’Union du Congo

1. Pourquoi les efforts fournis en matière de réforme du secteur de la sécurité n’aboutissent pas à la paix en RD Congo ?

Si la paix tarde à se matérialiser, c’est parce que la sécurité de la RD Congo est conditionnée non seulement par celle de ses voisins, mais aussi par celle des pays de l’Afrique centrale, australe et orientale. Par sa situation géographique, notre pays est de facto le cœur de la géopolitique du continent. Nous devons donc garantir la stabilité de notre territoire national et développer une diplomatie efficace, car la paix et la sécurité régionales ne pourraient être sauvegardées que grâce à l’implication de différents acteurs régionaux, voire continentaux. Sachons que l’existence des bases communes aux populations africaines est l’un des éléments fondamental pour la mise en place d’un système confédéral de protection.

2. Pourriez-vous préciser votre pensée, s’agissant de ce système confédéral de protection ?

Aujourd’hui, aucun pays africain ne peut relever, à lui tout seul, les défis de sécurité et de stabilité au regard des contextes géopolitique et géostratégique. Il est donc primordial pour l’Afrique, en particulier pour les pays de la CEEAC et des Grands Lacs, de mettre sur pied une organisation régionale pour la consolidation et la préservation de la paix. Union du Congo a toujours préconisé la création de cette instance régionale qui devra regrouper une grande partie des États concernés en vue de promouvoir la paix, la sécurité et la stabilité au sein des espaces régionaux des Grands Lacs, de l’Afrique centrale, australe et orientale, tout en prenant en compte les facteurs socio-culturel, politique, économique et environnemental. Il faut raisonner en terme de sécurité globale. En effet, le fait de conclure un pacte axé sur la mise en place d’une politique commune de défense et de sécurité permettra l’indépendance dans l’interdépendance.

3. Comment comptez-vous agir concrètement, face aux pesanteurs ethniques et aux ambitions démesurées de quelques voisins de la RD Congo ?

Si jamais nous arrivons au pouvoir, nous inciterons nos partenaires régionaux à s’associer au projet concernant le pacte de stabilité des systèmes régionaux communs de défense et de sécurité ainsi qu’à un projet de paix spécifique aux pays des Grands Lacs et de l’Afrique orientale. Nous initierons la conférence intergouvernementale sur la sécurité, la défense, la paix et la coopération régionale, qui réunira les Chefs d’État et de gouvernement concernés afin d’examiner et de mettre en commun les moyens d’affirmer une véritable identité et une réelle appartenance régionales. Cette organisation devra tenir compte, dans son fonctionnement, des spécificités de chaque pays.

4. Quels seront les élé ments constitutifs de ce pacte de stabilité des systèmes régionaux communs de sécurité et de défense ?

L’émergence d’une coopération en matière de sécurité et de défense à l’échelle régionale permettra de prévenir toute menace, de doter les différents partenaires d’outils communs pour mieux coordonner les actions contre les éléments négatifs et de promouvoir des mesures pour le maintien, le rétablissement de la paix ainsi que de la sécurité régionale. Ce pacte devra reposer sur le principe de la solidarité entre les partenaires et contenir une clause de non-ingérence dans les affaires intérieures d’un État signataire. Il s’agira donc d’un mécanisme de légitime défense collective qui devra, en outre, envisager des organes décisionnels habilités à constater les entorses, les manquements ainsi que le non-respect des engagements pris et entérinés par les États signataires. Toutefois, chaque décision devra tenir compte de divers textes internationaux existants.

5. Pourquoi la RD Congo devra-t-elle faire toutes ces concessions, alors que sa position géostratégique et ses atouts économiques ne l’obligent pas à maintenir forcément des relations étroites avec tous ces voisins ?

Notre pays ne doit pas se permettre de rester dans une inertie totale au moment où ses voisins se livrent à des actes de subversions occasionnant des troubles, le pillage de ses ressources, l’infiltration de sa population et de ses institutions par des personnes étrangères, les viols des femmes et des enfants du simple fait d’être nés Congolais, une catastrophe humanitaire qui occasionne le déplacement des milliers de personnes, le génocide des plusieurs millions de citoyens congolais... Les questions, telles qu’elles se posent dans la région, dépassent les frontières des États souverains. Pour arriver à stabiliser toute l’Afrique centrale, notamment la région des Grands Lacs, il faudra obligatoirement envisager l’avenir au-delà des territoires nationaux. Au sein d’Union du Congo, nous estimons que les réponses aux risques d’explosion qui menacent la région résident dans la stratégie de la cogestion de la sécurité et de la défense régionales. Le conseil permanent du pacte devra donc se doter des mécanismes constants pour prévenir les conflits, rétablir la paix et sanctionner en cas de manquement aux accords contractés.

Propos recueillis par Robert Kongo, correspondant en France

© Le Potentiel

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