vendredi 25 janvier 2013

RDC : le masque tombe à Kampala

Selon Fred Opolot, porte-parole de la présidence ougandaise, « au dernier sommet des chefs d’États de la Conférence des Grands Lacs, il a été établi devant le président Kabila que les questions soulevées par le M23 [devaient] être écoutées ». Une façon sibylline de faire comprendre à la délégation de Kinshasa que Yoweri Kaguta Museveni approuve l’idée d’aborder à Kampala, peu importent la forme et le temps que prendront les pourparlers, tous les problèmes de la République Démocratique.

Le président ougandais Yoweri Kaguta Museveni, le Bismarck des Grands Lacs.

La force internationale neutre, future brigade de la Monusco

Dans une interview accordée à la presse chinoise, le ministre congolais des Affaires étrangères, Raymond Tshibanda, rappelle que lors de la réunion qui s’est tenue en décembre 2012 à Addis-Abeba, les Nations Unies, l’Union africaine, la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL) et les pays de la Communauté de développement de l’Afrique australe  (SADC) avaient convenu, en présence de l’ensemble des partenaires bilatéraux et multilatéraux, de faire de la force internationale neutre une brigade spéciale au sein de la Monusco. Ce choix a été privilégié dans l’optique de faciliter l’opérationnalisation de la force. On doit donc revoir à cet effet, en termes de renforcement, le mandat de la mission onusienne.
Tous les participants à la rencontre, qui a eu lieu au siège de l’Union africaine, ont la ferme conviction que l’on doit plus rapidement traduire la force dans les faits. S’ils ont opté pour cette formule, pourquoi les ministres de la Défense des pays de l’Afrique australe et des Grands Lacs ont-ils recommandé, à Kampala, le remplacement de la Monusco par la force internationale neutre ? Entre-temps, le Conseil de sécurité des Nations Unies a donné son feu vert à l’utilisation de drones de surveillance dans la région du Kivu par la force de maintien de la paix.

Une attitude très bismarckienne

Curieusement, le changement d’attitude du président Yoweri Kaguta Museveni intervient au moment où les divergences s’amplifient au sein du M23. Selon le porte-parole militaire de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République Démocratique du Congo (Monusco), le commandant Ibrahim Diene, le renforcement des positions du M23 dans les zones occupées du Nord de Goma n’a pu empêcher la défection de nombreux rebelles qui continuent à se rendre aux différents postes opérationnels de la force de la paix qui aurait notamment signé leur reddition. Le président ougandais, en abondant dans le sens des agresseurs du M23, désavoue de facto ses homologues rwandais et congolais. Compte-t-il en réalité court-circuiter le dialogue intercongolais, tant souhaité par le président congolais, en vue de la cohésion nationale ? Le soi-disant Bismarck des Grands Lacs, profitant de la mauvaise posture dans laquelle se trouve Paul Kagamé, veut-il enfin confirmer son hégémonie sur l’ensemble des pays de la région ?

Délocaliser la rencontre de Kampala

En désapprouvant le facilitateur Chrispus Kayonga, le président ougandais vient de confirmer sa partialité. Il montre publiquement qu’il est à la fois juge et partie. Quelle doit être la réaction de Kinshasa, maintenant que Yoweri Kaguta Museveni a montré son vrai visage ? Par l’attitude de son président, mine de rien, l’Ouganda offre à la délégation conduite par Raymond Tshibanda l’occasion de claquer la porte et de solliciter un autre médiateur, tel que Denis Sassou Nguesso du Congo-Brazzavile, en vue de la poursuite des pourparlers. Leur externalisation est plus que jamais de mise. La balle est maintenant dans le camp de Joseph Kabila. Il doit façonner l’argile pendant qu’elle est humide.

Gaspard-Hubert Lonsi Koko

© Jolpress

À lire aussi :

- RDC : faut-il remplacer la Monusco par une force internationale neutre ?
- Kinshasa, le cadre légitime du dialogue interconglais 
- Quel avenir pour les pays des Grands Lacs africains ?

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire