lundi 28 mai 2012

Cinq questions à Gaspard-Hubert Lonsi Koko sur l'élection de François Hollande à la présidence de la République française


1. Le 6 mai 2012, François Hollande a été élu président de la République française. Une journée aussi historique que celle du 10 mai 1981 pour un ancien cadre du parti socialiste français que vous êtes ?
Le 6 mai 2012 restera une journée historique pour la jeunesse qui n’a pas connu la première victoire au suffrage universel d’un socialiste à la présidence de la République française, celle de François Mitterrand en 1981. Pour les anciens, cet événement a confirmé que l’histoire n’est qu’un perpétuel recommencement. Le point commun, aussi bien pour les jeunes que pour les aînés, c’est le rassemblement symbolique à la place de la Bastille, ce lieu mythique pour le peuple de gauche, à travers la célébration d’un second président socialiste prénommé François. Cette date représente dans l’absolu, pour le socialiste que je suis, le triomphe des idées de la social-démocratie sur le libéralisme non contrôlé.

2. 51,6 % des voix contre 48,4 % à Nicolas Sarkozy. Ce résultat vous semble-t-il honorable ?
Je rappelle que ce résultat correspond, à quelques chiffres près, à celui qui avait permis à François Mitterrand de battre Valéry Giscard d’Estain en 1981. Il est honorable, car François Hollande a triomphé du président de la République sortant. Cela laisse augurer non seulement un second mandat pour l’heureux élu, mais préfigure aussi les prochaines victoires des socialistes européens.

3. Que vous inspire l’anaphore déclinée 16 fois par François Hollande au cours du débat de l’entre-deux-tours avec Nicolas Sarkozy : « Moi, président… » ?
Cette figure de style a marqué plus d’un électeur. C’était la preuve de la certitude de François Hollande dans la victoire contre Nicolas Sarkozy. Le peuple de France a eu l’impression que le candidat socialiste incarnait la personne idéale à la fonction présidentielle. Il a senti la volonté d’un homme d’enrichir le troisième millénaire de l’humanisme français. Ainsi François Hollande s’est-il élevé à la hauteur des illustres socialistes hexagonaux comme Gracchus Babeuf, Jean Jaurès, Léon Blum et François Mitterrand.

4. Le débat sur le besoin de croissance s’est engagé en Europe. Est-ce que la victoire de François Hollande, lui , qui soutient avec force cette idée, pourrait être un tournant pour l’Europe ?
Malgré le pessimiste d’Angela Merkel par rapport à une croissance à crédit et les déclarations de Bruxelles sur l’éventualité d’un dérapage du déficit français, François Hollande doit maintenir le cap pour ce qui est de la prévision de croissance à 1,7% en 2013. De plus, le rôle d’un État socialiste nouveau consistera à instaurer des mécanismes de contrôle du capitalisme qui se développera – non seulement au profit des actionnaires, mais aussi des salariés – sous la garantie de la loi. Rappelons que pour François Hollande, il ne s’agit pas de relancer la croissance d’un côté en aggravant les déficits et la dette de l’autre.
L’objectif du président français nouvellement élu, c’est de parvenir, en quelque dizaines d’années, à la démocratie économique et sociale que poursuivent les socialistes depuis plus de deux siècles. Ainsi, doit-il initier des réformes sociales qui aboutiront à une réduction de la disparité des conditions humaines en limitant, entre autres mesures, le plafond de la richesse individuelle. Cela permettra l’émergence d’un système basé sur une démocratie financière et industrielle au sein des entreprises européennes, dont la productivité et le taux de croissance doperont l’économie. La victoire de François Hollande constitue bel et bien un tournant favorable à une Europe politique et sociale.

5. Après cinq ans de sarkozysme, le nouveau président français cristallise de nombreuses attentes en Afrique, notamment sur la fin de la fameuse Françafrique. Selon vous, quelle doit être la politique africaine de François Hollande ?
Pour imposer la marque d’une nouvelle politique africaine, François Hollande doit prendre le taureau par les cornes. En effet, il doit privilégier le régionalisme et le multilatéralisme dans les relations avec le continent africain. Il doit aussi s’appuyer sur les Français africains en vue de la réorientation et de la dynamisation des échanges entre l’Europe et l’Afrique. Encore faut-il que les Africaines veuillent un réel changement dans leur rapport avec le reste du monde. François Mitterrand nous a appris qu’«il n’y a pas d’espérance sans courage et ténacité». François Hollande doit donc conditionner le partenariat avec les pays d’Afrique à l’instauration des États de droit et au développement économique. Si l’innovation passe par un discours sur les investissements, toute relation future devra tenir compte des aspirations des peuples concernés qui devront se montrer à la fois imaginatifs et entreprenants.

Propos recueillis par Robert Kongo, correspondant en France


(*) Porte-parole du Rassemblement pour le développement et la paix au Congo (RDPC)

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